12/09/2011 info-palestine.net  7min #57276

 Les révolutions arabes

Printemps arabe : l'Occident doit réviser sa grille de lectureligue arabe : Trop c'est trop

K. Habib/K. Selim - Le Quotidien d'Oran

Les manifestations de vendredi au Caire contre la représentation diplomatique israélienne sont... une démonstration de la fausseté de l'analyse occidentale sur le printemps arabe...

Printemps arabe : l'Occident doit réviser sa grille de lecture

par Kharroubi Habib

Tel qu'il s'est produit et par ce qu'il vise à atteindre, le printemps arabe oblige dirigeants et politologues en Occident à réviser la perception initiale simpliste qui a guidé leur analyse de l'évènement. Condescendants à l'égard des peuples qui sont les acteurs des révolutions dont le monde arabe est le théâtre, ils n'ont en effet voulu voir en elles que ce qui cadre avec la grille d'analyse qui est leur concernant les réalités de ce monde. C'est ainsi qu'ils ont décrété que les peuples en révolte n'ont d'autre revendication que celle d'en finir avec des régimes et des potentats dictatoriaux arrivés à un stade final d'impéritie et d'injustice. Autrement dit, qu'une fois ce but atteint, ils n'ont aucune visée de remise en cause des rapports déséquilibrés et méprisants que l'Occident entretient avec leurs pays respectifs et de sa façon de se comporter à leur égard.

Les manifestations de vendredi au Caire contre la représentation diplomatique israélienne sont à ce titre une démonstration de la fausseté de l'analyse occidentale sur le printemps arabe. Ou du moins de son étroitesse. Elles ont fait comprendre que le peuple égyptien ne s'est pas débarrassé de Moubarak et de son régime pour continuer à accepter que l'État d'Israël se comporte et agisse à l'égard de l'Égypte comme il le faisait du temps de sa dictature et de sa politique de totale soumission à l'endroit de ses visées et volontés. La colère qui, au Caire, a visé l'ambassade d'Israël exprime que les Égyptiens conçoivent que leur libération de la dictature s'accompagne du refus de l'humiliation de leur pays par l'étranger.

L'État sioniste et ses relais propagandistes ne se sont pas mépris sur la signification de ce qui s'est passé vendredi au Caire contre la représentation diplomatique israélienne. Ils s'obstinent néanmoins à en ternir le message en lui donnant la traduction visant à conforter l'image dévalorisante qu'ils veulent donner du printemps arabe à l'opinion internationale. Les manifestants qui s'en sont pris à l'ambassade israélienne ont été pour ce faire traités de « horde déchaînée » et leur colère taxée de « réaction antijuive ». Une présentation qui a pour but de renforcer en Occident le sentiment anti-arabe que le printemps du même nom est en train de priver de son argumentaire traditionnel.

Ce printemps arabe est pour Israël la plus dangereuse menace qui lui vient du monde arabe depuis sa création. Non pas parce qu'il remet en cause l'équilibre de force militaire entre lui et les États arabes, mais pour ce qu'il est en train de produire de changements dans ces États arabes, qui réduisent à néant son dispositif propagandiste servant à perpétuer la fausse vision d'un État hébreu unique en démocratie au Moyen-Orient. Au grand dam d'Israël et de ses soutiens, le monde arabe se démocratise et ses peuples sont aussi aptes désormais que le peuple israélien à être considérés comme des acteurs politiques majeurs qui n'entendent pas se faire dicter les solutions aux problèmes de leurs pays ou de la région.

Entre ces peuples et Israël, la cause palestinienne est plus que jamais au cœur de leurs rapports. Les peuples arabes ont désormais la latitude et la détermination d'imposer à leurs gouvernants de ne plus faire dans la compromission et la trahison au sujet de cette cause.

 Analyse


TROP, C'EST TROP !

par K. Selim

Dans un monde arabe encore monarchique, autocratique ou dictatorial, la Ligue arabe n'a pas vocation à défendre les sociétés contre les semblants d'États qui les étouffent. C'est une organisation des États et son attitude varie au gré du vent et des rapports de force entre gouvernements.

Que faut-il comprendre quand cette Ligue envoie une délégation dans une Syrie où le régime n'en finit pas de réprimer dans le sang des femmes et des hommes qui ne supportent pas l'indignité qui leur est faite et qui ont montré qu'ils ne reviendront pas en arrière ? Que même les « frères » des autres gouvernements ne peuvent plus faire semblant d'ignorer ce qui se passe en Syrie. Et qu'ils ne peuvent pas s'abriter derrière la notion de non-ingérence. Qui est d'ailleurs une notion incongrue au regard de l'idéologie « panarabiste » du parti Baath officiellement au pouvoir en Syrie. Théoriquement, le panarabisme proclamé devrait au contraire inciter les autres Arabes à s'intéresser à ce qui se passe partout dans le monde arabe. A plus forte raison quand des régimes pervers ne jouent plus que sur la violence et sur les nuisances qu'ils peuvent infliger à leurs peuples et à leurs pays.

Il ne faut pas se faire d'illusion sans doute sur la mission de la Ligue arabe. Le mieux qu'elle puisse faire est d'essayer d'apporter à Bachar Al-Assad et ceux qui l'entourent autre chose que la propagande qu'ils distillent et à laquelle ils finissent par croire. C'est la loi du genre. Celle de l'auto-intoxication propre aux organisations à fonctionnement sectaire.

De retour de Damas, Nabil Al-Arabi, le secrétaire général de la Ligue arabe, a indiqué qu'un accord avait été trouvé pour mener les réformes en Syrie. On ne connaît pas encore la nature de ces réformes. Sans rejeter la démarche de la Ligue arabe, les forces d'opposition syriennes restent prudentes. Elles ont de bonnes raisons pour cela car la répression s'est poursuivie avant, au moment et après le passage de la délégation de la Ligue arabe.

Cette opposition, après plus de 2 000 morts, estime que les Syriens ne sont plus demandeurs de réformes mais de changement. C'est, vu de l'extérieur, une évidence. Il y a eu tant de morts que les Syriens ne peuvent accepter autre chose qu'un changement de régime. Il reste à en trouver les modalités et les mécanismes. Rendus difficiles par l'enfermement absurde du régime dans le tout répressif et dans l'entretien des appréhensions communautaires.

La crise syrienne, en raison de l'entêtement criminel du régime, semble condamnée à aller vers le pire logique : une guerre civile qui justifiera une intervention étrangère, suivie d'une présence de longue durée. C'est officiellement ce que ne souhaite pas le régime, mais c'est pratiquement vers où mènent depuis des mois tous ses actes. Même quand il fait mine de parler de politique, il ne fait que ruser : il ne cherche pas une issue qui passe fatalement par son démantèlement.

Le fait que le secrétaire général de la Ligue arabe affirme son refus de toute ingérence étrangère devient un simple exercice de style quand le régime de Damas s'évertue, chaque jour qui passe, à en créer les conditions. La Ligue arabe semble surtout tendre une perche à Bachar Al-Assad. Les messages s'accumulent. Même l'allié iranien signifie à Bachar Al-Assad qu'il fait fausse route et qu'il doit répondre « rapidement » aux « revendications légitimes de son peuple ».

De partout arrive un message simple : trop, c'est trop ! Il n'est pas sûr qu'il soit perçu à Damas.

 Éditorial

De K. Habib : 

 Les démocrates devraient se garder de pavoiser pour ce qui se passe en Libye
 L'après-Kadhafi se fera dans la douleur et le sang
 Quand l'OTAN se montre pour ce qu'elle est
 Quand légalité internationale rime avec loi du plus fort
 Tentative de diversion sur l'impasse en Libye
 Un quartette et une communauté internationale tétanisés

De K. Selim : 

 Un printemps arabe dans l'hiver palestinien
 Le grand jackpot
 Ce qu'État fort veut dire
 Joyeux anniversaire, général !
 Cela n'arrive pas qu'aux autres
 La retraite des assassins
 La loi des "Banksters"

 info-palestine.net