Par quel retournement de situation l'attentat contre un journal présenté comme l'apôtre de la liberté d'expression a-t-il conduit à une loi faisant reculer les libertés publiques ? Par quel aveuglement un gouvernement présenté comme « de gauche » conduit-il une politique néo-libérale et répressive ? Par quelle pente fatale la crise écologique et sociale qui devrait mobiliser les citoyens pour le changement conduit-elle à l'apathie et à l'acceptation du pire ?
C'est le mystère de l'époque - qui n'en est, à vrai dire, plus un : dans sa phase actuelle, le néo-libéralisme, fondé sur le complexe croissance-inégalités, ne peut plus se maintenir que par un glissement continu vers l'autoritarisme et la guerre. Prétendant répondre aux maux que sa politique génère, il prend maintenant appui sur le « terrorisme » pour imposer aux peuples les amères pilules de la stratégie du choc.
Dans le cas de la France, cela prend la forme d'une alliance implicite entre le PS et l'UMP, qui explique pourquoi le gouvernement le plus impopulaire de la V e République continue à agir sans difficulté véritable : il bénéficie pour tous les actes décisifs (loi Macron, loi sur le renseignement, grands projets inutiles, soutien aux banques et aux grandes entreprises) de l'appui de l'UMP.
L'illustration récente en est la loi sur le renseignement, qui doit être votée mardi 5 mai à l'Assemblée, en procédure d'urgence. Comme Reporterre l'a expliqué ainsi que beaucoup d'autres observateurs, cette loi permettra sans véritable contrôle la surveillance de la population française, à travers les échanges sur internet et les communications téléphoniques. Si, officiellement, seuls les terroristes sont visés, tous les mouvements de contestation de l'ordre établi, à commencer par les luttes écologistes, rentreront dans le système de surveillance, au nom des « violences collectives de nature à porter atteinte à la sécurité nationale » : ZAD et antinucléaires n'ont qu'à bien se tenir...
Vous croyez que j'exagère ? Explorez notre rubrique Libertés pour vous faire une opinion, ou rappelez-vous comment la bataille de Sivens a été gérée. Le pouvoir cible, autant que les terroristes, « l'ennemi intérieur », celui qui remet en cause le système destructeur qui régit fatalement notre présent.
La seule arme qui reste aux citoyens conscients est de se mobiliser, de résister sans relâche, de convaincre nos concitoyens qu'un autre monde est possible, de faire vivre des médias libres. A court terme, se joindre aux rendez-vous de ce lundi pour la liberté et [en interpeller les députés]