Justice

 Mobilisations du 17 novembre : ce que proposent la gauche et les mouvements sociaux

 Gilets jaunes : nous sommes le peuple

 De la crise symbolique à la crise politique

 Live: France - Gilets jaunes: Nouvelle journée de tensions à Paris

 Gilets jaunes: l'aventure continue

 France/gilet jaunes: mobilisation modérée pour l' » acte 5 » à Paris

 Acte 6 des Gilets jaunes : une diversion organisée à Versailles ?

 Acte 7 des Gilets jaunes : une mobilisation bien plus forte en province qu'à Paris

 Acte 8 des Gilets jaunes : après les vœux de Macron, première mobilisation de 2019 (En Continu)

 Acte 9 : les Gilets jaunes se mobilisent partout en France (En Continu)

 Acte 10 des Gilets jaunes : une mobilisation sur fond de Grand débat national

 Acte 11 : les Gilets jaunes poursuivent leur mobilisation (En Continu)

 Gilets jaunes : un acte 12 en hommage aux blessés et aux victimes (En Continu)

 Acte 13 : les Gilets jaunes à nouveau dans les rues aux quatre coins de la France (En Continu)

 Acte 14 : après trois mois, la mobilisation des Gilets jaunes se poursuit (En Continu)

 Gilets jaunes : un acte 15 marqué par un rebond ? (En Continu)

 Acte 16 : des Gilets jaunes se rassemblent partout en France (En Continu)

 Acte 17 des Gilets jaunes : le maire d'une petite commune prend un arrêté interdisant les Lbd

 Gilets jaunes : un acte 18 pour marquer une nouvelle phase de la mobilisation (En Continu)

 La mission Sentinelle mobilisée et renforcée pour la prochaine manifestation des Gilets Jaunes

 Gilets jaunes : un acte 19 à haut risque (En Continu)

 Acte 20 des Gilets jaunes : Bordeaux au coeur de la mobilisation ? (En Continu)

 Acte 21 : les Gilets jaunes poursuivent leur mobilisation (En Continu)

 Acte 22 : situation tendue à Toulouse, manifestations dans le calme à Paris (En Continu)

16/04/2019 vududroit.com  6 min #154875

Acte 22 : situation tendue à Toulouse, manifestations dans le calme à Paris (En Continu)

Gilets jaunes : des détentions arbitraires

 Atlantico a sollicité mon avis après les révélations publiées par David Dufresne sur la façon dont les forces de police manipulaient les gardes à vue. Piochant après les arrestations pour trouver un motif justifiant ses privations de liberté. Nouveau scandale qui montre à quel point le pouvoir d'Emmanuel Macron se moque des libertés publiques. Faisant commettre à cette occasion aux forces de police, et sans que cela n'arrache un froncement de sourcils à la justice, l'infraction gravissime de détention arbitraire par agent public. À un moment, il faudra sérieusement lui demander des comptes.

MANIFESTATIONS GILETS JAUNES : anatomie d'un cas de garde à vue à motif aléatoireCe lundi 15 avril, le journaliste David Dufresne publiait son 624e signalement au ministère de l'intérieur, dans le cadre du mouvement des Gilets jaunes, s'appuyant sur un enregistrement audio pointant un motif aléatoire retenu pour une garde à vue.

Atlantico : Cet enregistrement permet-il de caractériser cette situation ? Comment interpréter ce cas ?

Régis de Castelnau : Très simplement. Les parquets ont reçu des consignes de la chancellerie pour procéder à des arrestations « préventives » illégales accompagnées de gardes à vue illégales. Le Canard enchaîné avait révélé le contenu d'un e-mail envoyé par le procureur du tribunal du grande instance de Paris à ses troupes. D'après ces consignes, les procureurs étaient invités à maintenir les gens arrêtés en garde à vue, même s'il n'y avait aucun motif pour le faire. L'objectif étant bien évidemment de les empêcher d'exercer leur liberté constitutionnelle de manifestation. Il semble que cette pratique se soit généralisée à la France entière ce qui en dit long sur la conception du pouvoir macroniste du respect des libertés publiques fondamentales et en particulier celles d'aller venir et de manifester. Parce qu'à l'écoute de l'enregistrement, nous avons l'illustration des techniques utilisées. On arrête les gens massivement, on les met en garde à vue, et c'est seulement à ce moment-là que l'on pioche dans le Code pénal pour savoir quelles infractions les services de police vont pouvoir utiliser pour justifier la rétention des personnes arrêtées. « Plouf plouf, toi ce sera « dégradations », plouf plouf, toi ce sera « rébellion », plouf plouf, toi ce sera « jet de projectiles ». Et tout ceci est évidemment couvert par des magistrats zélés qui ne voient aucun inconvénient à d'aussi grossières violations de la loi qu'ils sont pourtant chargés de faire respecter.

Il serait peut-être utile de rappeler aux agents publics que sont les procureurs et les fonctionnaires de police le texte de l'article 432-4 du Code pénal :

« Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, d'ordonner ou d'accomplir arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende. »
Si l'État de droit dont le pouvoir se rengorge à toute occasion, n'était pas à géométrie variable désormais dans notre pays, il y a longtemps qu'il aurait été mis fin à ces pratiques et que les responsables auraient été sanctionnés.

Que peut révéler ce cas d'espèce sur la situation globale des gardes à vue depuis le début du mouvement des Gilets jaunes ?

Les brutalités policières à foison que chacun peut voir sur d'innombrables vidéos qui circulent relèvent de la législation sur les violences accomplies par des fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions. Depuis le début mouvement des gilets jaunes, ceux qui s'y livrent sont scrupuleusement protégés de toute poursuite malgré les évidences. Mais s'agissant de ces interpellations et de cette utilisation systématique, délibérée et organisée des gardes à vue comme outil d'arrestations préventives, nous sommes en présence d'une décision politique pour porter atteinte au droit de manifester. Le pire répétons-le est que ces dérives sont organisées par ces magistrats, pourtant chargés de faire respecter la loi. Auxquels les forces de police ne font qu'obéir. On rappellera cependant à ces dernières, qu'obéissant ainsi à des ordres aussi manifestement illégaux, elles engagent leurs propres responsabilités pénales.

Nous avons là l'illustration de l'acharnement obtus d'Emmanuel Macron, qui incapable d'imaginer une solution politique à la crise, n'envisage comme sortie qu'une répression policière et judiciaire sans précédent depuis la guerre d'Algérie. Et avec cette instrumentalisation, il a pris le risque de porter atteinte à la confiance qui devrait exister entre les citoyens et les autorités policières et judiciaires. Cette confiance est désormais lourdement obérée, et probablement pour longtemps.

Quels sont les recours potentiels dans un tel cas ? Quelles pourraient en être les conséquences, à terme, pour le gouvernement ?

La question est de savoir combien de temps une partie la magistrature française peut accepter de continuer à faire ce sale boulot. On rappellera que malheureusement au zèle des parquets à exécuter les ordres illégaux du gouvernement, s'est ajouté celui de beaucoup de juges du siège qui ont oublié que leur mission n'était pas de rétablir l'ordre mais de rendre la justice, ce qui n'est pas la même chose. Procédures illégales, incriminations fantaisistes et peines parfois délirantes, le mouvement des gilets jaunes a payé un lourd tribut à cette ivresse répressive.

En ce qui concerne les recours, il n'y a pas grand-chose à espérer pour le moment parce qu'en effet la répression des illégalités exposées ici relève de la compétence de la justice... Tout le monde aura noté l'assourdissant silence des organisations syndicales de magistrats pourtant habituellement très prolixes quand il s'agit de donner de leçons. Il faut simplement prendre date, et que toutes ces infractions et ces atteintes aux libertés fassent l'objet de plaintes et qu'il en reste ainsi la trace.

Car en fait la question est essentiellement politique. La presse et les gouvernements étrangers, jusqu'aux institutions internationales stupéfaits de ces dérives ont manifesté leur émotion. Dans l'opinion publique française la perception de cette réalité est acquise. Les deux corps concernés, police et justice qui ont accepté, d'être le bras armé de la seule solution répressive, sont aujourd'hui incontestablement traversés par des contradictions. Il est clair que des changements politiques adviendront, personne ne pouvant raisonnablement penser que cette situation de blocage puisse perdurer. Il n'est pas audacieux de dire que le quinquennat d'Emmanuel Macron est terminé sous sa forme initiale. Ceux qui ont été à la manœuvre de ce qui s'est produit depuis le mois de novembre en matière d'atteintes aux libertés auront à rendre des comptes. Il faudra y veiller.

 Régis de Castelnau

 vududroit.com

 Commenter