Source : Le Parisien, R. K., AFP, 02-07-2019
Cette octogénaire est décédée après avoir été grièvement blessée par une grenade, à la fenêtre de son appartement, lors d'une manifestation de Gilets jaunes à Marseille.
Les autorités françaises ont jusqu'à présent maintenu qu'il était impossible d'établir si le décès de Zineb Redouane était dû au tir policier. DR
Une autopsie réalisée par la justice algérienne contredit la version des autorités françaises sur la mort de Zineb Redouane, révèle Le Média ce mardi. Cette octogénaire avait été touchée par une grenade lacrymogène à sa fenêtre, au quatrième étage, lors d'une intervention policière sur des manifestations violentes à Marseille (Bouches-du-Rhône), début décembre, avant de décéder le lendemain.
Les autorités françaises ont jusqu'à présent maintenu qu'il était impossible d'établir si ce décès était dû au tir en question. Le corps de cette Algérienne a été rapatrié depuis. Des médecins légistes du centre hospitalo-universitaire d'Alger se sont donc livrés à leur tour à une autopsie. Leurs conclusions incriminent le traumatisme crânien provoqué par le tir policier.
« Directement responsable de la mort »
« L'importance de ce traumatisme est directement responsable de la mort par aggravation de l'état antérieur de la défunte, malgré les soins prodigués en urgence », affirment les deux légistes dans un rapport daté du 25 décembre 2018.
Ces éléments interviennent alors que le policier qui a tiré ce jour-là n'a toujours pas été identifié, sept mois après le décès de l'octogénaire. Fin janvier, les enquêteurs de l'IGPN ont entendu les cinq CRS dotés de lanceurs de grenade qui se trouvaient sur les lieux, ainsi que le capitaine qui les dirigeait. Confrontés aux images de vidéosurveillance, aucun n'a désigné le tireur, ou n'a reconnu avoir tiré.
« Mauvaise foi »
Au total, ce jour, 200 grenades ont été tirées, selon les déclarations de leur chef au cours de ces auditions, dévoilées par Mediapart. Sur les images, un CRS fait un tir « en cloche », en direction de l'immeuble de Zineb Redouane, puis quelques secondes après prend du recul et regarde à plusieurs reprises en hauteur, face à lui.
Trois policiers ont récusé apparaître, dont l'un car il portait une barbe et un autre une cagoule et des lunettes, alors que le CRS n'en a pas sur les images, et deux ne se prononcent ni dans un sens ni dans l'autre. « Ces policiers, qui n'ont même pas été placés en garde à vue contrairement à l'usage, savent qui a tiré et font preuve d'une mauvaise foi évidente », accuse l'un des avocats de la famille Redouane, Me Yassine Bouzrou.
Une munition non identifiable
Le numéro de la grenade qui a touché Zineb Redouane, retrouvée dans l'appartement, ne permet pas non plus d'identifier le tireur car il s'agit d'une munition « de remplacement », après l'épuisement d'un premier stock, selon ces auditions.
Les fonctionnaires, expérimentés, assurent s'être abstenus de tout tir tendu, conformément à la législation. Selon la fille de Zineb Redouane, rapportant des propos de sa mère au téléphone au moment de l'impact, un policier l'aurait au contraire regardée et visée.
Un dépaysement à venir
De leur côté, les CRS insistent sur le climat particulièrement violent, ce soir-là à Marseille. Toujours d'après Mediapart, deux d'entre eux, entendus à une heure d'intervalle par la même enquêtrice de l'IGPN le 25 janvier, auraient fait à deux reprises exactement les mêmes réponses, au mot près, décrivant par exemple une « guérilla urbaine, très violente, très angoissante ».
Source : Le Parisien, R. K., AFP, 02-07-2019