Le chef d'Etat a déploré l'attitude des Français qui bravent les consignes de confinement en pleine épidémie. En effet, d'aucuns profitent des beaux jours pour se balader ou flâner. La faute aux pouvoirs publics ou inconscience des Français ?
Emmanuel Macron est remonté contre une certaine frange de la population : les citoyens qui refusent de suivre scrupuleusement les consignes de confinement, en œuvre depuis le 17 mars pour lutter contre le Covid-19. «Quand je vois que des gens continuent à aller au parc, à se mettre ensemble, à aller à la plage ou à se ruer dans les marchés ouverts, c'est qu'ils n'ont pas compris les messages», a ainsi critiqué le président, en marge d'une visite à l'Institut Pasteur à Paris le 19 mars.
«Ce n'est pas aujourd'hui parfaitement respecté [et] on a beaucoup de nos concitoyens qui prennent encore ça à la légère», a-t-il déploré.
En effet, de nombreuses vidéos et constations semblent indiquer qu'une partie des Français n'ont pas totalement saisi les règles de confinement. A Paris, la journaliste de France info Muriel Gensse a filmé le 18 mars les passants d'une rue de la capitale, certains se baladant en famille, malgré l'interdiction.
Sur une plage, un reporter de Nice Matin a interviewé le 19 mars une Niçoise qui entretenait son bronzage. Elle trouvait «aberrantes» les mesures sanitaires, dont la fermeture des plages.
A Bordeaux, un photographe de l'AFP a également constaté, le matin du 19 mars, de nombreux promeneurs et joggeurs.
Face à ce phénomène, encouragé par une météo ensoleillée, les autorités ont interdit au troisième jour du confinement, avec la prise d'arrêtés préfectoraux, l'accès aux plages de tout l'arc méditerranéen, de la Corse et de nombreux départements de la façade atlantique. Les quais de la Garonne ont par ailleurs été interdits à Bordeaux. Des mesures d'urgence, telles que la fermeture de pistes cyclables et de plage, ont aussi été prises à l'île de Ré, après un afflux de résidents secondaires particulièrement de l'Ile-de-France, comme le rapportent plusieurs médias. «En quelques heures entre la fin du week-end et la journée [du 18 mars], la population de l'île de Ré s'est vue grandir de 18 000 à quelque 21 000 ou 22000 habitants», constate France 3. «On sait que des résidents secondaires sont arrivés car il y avait beaucoup de monde dans les supermarchés, la gendarmerie a dû intervenir au Leclerc de Saint-Martin-de-Ré pour rappeler les règles», a confirmé auprès de l'AFP Patrick Rayton, maire de La Couarde-sur-Mer (1 100 habitants) sur l'île de Ré. «Il y a du monde sur les plages, sur les pistes cyclables», a noté l'édile, qui a donc décidé de prendre un arrêté interdisant l'accès aux plages de sa commune.
Le manque de discipline a d'ailleurs provoqué une situation surprenante, en poussant le maire PS de Paris Anne Hidalgo et le préfet de police Didier Lallement à réagir dans un communiqué commun, en dénonçant «certains comportements inacceptables [qui] perdurent». Dans cet «appel solennel», Anne Hidalgo et Didier Lallement ont observé que «certains secteurs de la capitale restaient []... trop fréquentés par des promeneurs et sportifs» et ont envisagé des «mesures pour interdire l'accès aux lieux les plus fréquentés», dans le cas où les Parisiens continueraient à se moquer des règles de confinement.
Les Français, réfractaires au confinement, sont-ils individualistes ? Ou n'ont-ils tout simplement pas compris le discours gouvernemental ?
Les Français n'auraient-ils pas saisi lesdites règles ? Pourtant, près de 35 millions de personnes ont suivi le 16 mars l'allocution dans laquelle Emmanuel Macron définissait les contours du confinement et des déplacements possibles (avec une déclaration sur l'honneur). Le «en même temps» serait-il responsable de la pagaille ? Il est en effet difficilement compréhensible pour le citoyen de recevoir l'injonction de rester chez soi, tout en se voyant expliquer, à travers les messages de l'exécutif, qu'il a le droit de pratiquer de l'exercice en extérieur.
D'autant plus que les marchés alimentaires à l'extérieur ont été maintenus, des centaines de Français se rendant donc sur les lieux, sans forcément respecter les distances de sécurité sanitaire entre eux. Les différentes déclarations de la ministre du Travail Muriel Pénicaud et d'Emmanuel Macron le 19 mars sur le devoir de travailler ne contribuent pas, elles non plus, à la compréhension. Alors que la première parle de «défaitisme» pour décrire un syndicat patronal du bâtiment qui conseillerait aux salariés de rester chez eux, le second a exhorté entreprises et salariés à «continuer à produire et à faire tourner le pays».
En outre, la dissuasion liée à la sanction de 135 euros en cas de «violation des interdictions de se déplacer hors de son domicile» est-elle prise à la légère du fait d'un manque de contrôles des forces de l'ordre ? Si, en 24 heures, 4 095 amendes ont été dressées, selon le ministre de l'Intérieur le 19 mars, le faible maillage des forces de l'ordre en zone rurale risque de compromettre l'application stricte du confinement. Une source policière francilienne contactée par RT France souligne le 17 mars : «Il y aura suffisamment d'effectifs pour contrôler dans les villes mais dans les campagnes, avec tous les départs des Parisiens en province, ça pourrait vite être compliqué. D'autant que ces personnes viennent d'un foyer épidémique.»
Une autre source policière nous confie ses doutes quant à l'application des mesures de confinement et son contrôle : «L'autorisation de sortie, OK, mais comment vérifier la véracité des informations pour nous ? Que devons-nous faire avec les personnes contrôlées qui disent aller à la pharmacie ou voir un proche en difficulté ? Les suivre ? Nous allons effectuer des contrôles pour leur mettre la pression en fait, mais nous ne pourrons pas vérifier. Au début, les gens appliqueront les consignes, ils auront peur, mais petit à petit, confinés à la maison avec les enfants et le retour du beau temps, je crains que ça ne tienne pas... Et si nous avons des dizaines de contrevenants à contrôler, verbaliser, je ne vois pas du tout comment on va faire, surtout sans matériel de protection. Nous voyons bien les collègues des autres pays : ils sont tous équipés, ils ont des gants, des masques et nous ? Pour l'instant, nous n'avons rien !»
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