25/04/2018 13 articles mondialisation.ca  8min #140576

 Les États-Unis, le Royaume-Uni et la France lancent des «frappes de précision» en Syrie

Au début de sa visite à Washington, Macron promet une guerre sans fin en Syrie

Avant que le Président français Emmanuel Macron arrive à Washington DC pour une visite d'État de trois jours hier soir, il a accordé un entretien approfondi à Fox News appelant à une guerre à long terme de l'OTAN en Syrie. Alors que les tensions entre l'Europe et l'Amérique continuent à monter sur les menaces de guerre commerciale de Trump et d'assaut contre l'Iran, les principales puissances impérialistes tentent de résoudre leurs différends sur la base d'un programme militariste agressif.

Ces propositions sont un avertissement que les appels de Macron pour un retour à la conscription en France, et des appels similaires en Suède et à travers l'Europe sont directement liés à des plans pour l'escalade de la guerre. Après sept ans de la guerre en Syrie, et face à l'effondrement de la position militaire de leurs forces mandataires, les principales puissances de l'OTAN préparent une escalade agressive au Moyen-Orient qui exigera des forces beaucoup plus grandes et donc le recrutement de ces forces parmi les jeunes.

Le journaliste de Fox News, Chris Wallace, a débuté par une question qui renvoyait obliquement à la crise interne grandissante aux États-Unis. Wallace a demandé si la nomination d'un avocat spécial enquêtant sur Trump affectait la crédibilité internationale de la présidence américaine, et si Macron pensait que Trump allait remplir son mandat.

Macron, qui est entré en fonction l'année dernière en France où l'état d'urgence en vigueur avait suspendu les droits démocratiques fondamentaux. Macron a copié beaucoup des dispositions de l'État d'urgence dans une nouvelle loi antiterroriste les rendant permanents. Il a maladroitement essayé de minimiser l'importance de la guerre entre fractions sans précédent à Washington : « Vous avez votre système. Vous êtes un pays libre avec un État de droit, ce qui est - je veux dire, très bon, j'ai la même chose dans mon pays ».

En dépit de la montée des spéculations et des craintes des élites dirigeantes sur le plan international à propos de la crise à Washington et de la menace à la survie politique du président américain, Macron prétendait que cela ne le concernait pas : « Je ne m'interroge jamais. Je travaille avec lui (Trump) parce que nous sommes tous les deux au service de notre pays. »

Interrogé sur la guerre par procuration de l'OTAN en Syrie, Macron a insisté sur le fait qu'il estimait que c'était vital pour les intérêts français que les États-Unis - et, implicitement, ses alliés européens - exercent un contrôle sur l'ancienne colonie française. « Nous devrons construire la nouvelle Syrie par la suite, et c'est pourquoi je pense que l'emprise américaine est très importante », a-t-il déclaré.

Macron a poursuivi : « Je serai très direct. Le jour où nous finirons cette guerre contre l'État islamique, si nous partons, définitivement et totalement, même d'un point de vue politique, nous laisserons la parole au régime iranien, Bachar al-Assad et ses hommes, et ils prépareront la nouvelle guerre. Ils alimenteront les nouveaux terroristes. Donc, mon point de vue est de dire, même après la fin de la guerre contre l'État islamique, les États-Unis, la France, nos alliés, tous les pays de la région, même la Russie et la Turquie, auront un rôle très important à jouer pour créer cette nouvelle Syrie et assurer que le peuple syrien décide de l'avenir. »

La justification de Macron pour la guerre contre la Syrie était, comme d'habitude, un tissu de mensonges. Ce n'est pas le régime syrien et ses alliés iraniens, mais les milices islamistes « rebelles » et leurs alliés saoudiens et de l'OTAN qui ont mené des attaques terroristes en Syrie et dans toute l'Europe. La prétention qu'une guerre interminable en Syrie servirait à combattre le terrorisme est une fraude politique, soulignée par le fait que déjà en 2012, les responsables américains ont admis qu'ils combattaient en Syrie dans une alliance avec des groupes liés à Al-Qaïda.

La « guerre contre la terreur » est simplement un prétexte commode pour que les grandes puissances impérialistes affirment leurs intérêts financiers et stratégiques dans le cœur de la masse continentale eurasienne riche en pétrole, et pour intensifier les attaques contre les droits démocratiques dans leur pays. En même temps, il permet aux grandes puissances de l'OTAN de se présenter comme unies, malgré les rivalités explosives et croissantes à la fois commerciales et militaires entre elles, qui deux fois au 20ᵉ siècle ont explosé en une guerre mondiale.

Wallace a interrogé Macron sur deux différends importants entre Washington et l'Union européenne (UE), sur les menaces américaines de suspendre le traité nucléaire iranien et d'imposer des tarifs commerciaux sur les exportations de l'UE vers les États-Unis. Les réponses du président français suggéraient une confusion et une panique grandissantes dans les cercles dirigeants à Paris, faisant face à la menace croissante que les politiques américaines provoqueraient un effondrement des relations commerciales et des guerres à grande échelle avec des ennemis nucléaires.

Sur les menaces américaines de guerre commerciale contre l'Europe, Macron prédit calmement que Trump « ne mettra pas en œuvre ces nouveaux tarifs et il décidera d'une exemption pour l'Union européenne. Vous ne faites pas de guerre commerciale avec votre allié [...] C'est trop compliqué de faire la guerre contre tout le monde. Vous faites la guerre commerciale contre la Chine, la guerre commerciale contre l'Europe, la guerre en Syrie, allez, cela ne marche pas. Vous avez besoin d'alliés. Nous sommes l'allié. »

Macron a réaffirmé la position des grandes puissances européennes, qui sont toutes hostiles aux menaces de Trump de mettre fin au traité nucléaire iranien de 2015. Il a qualifié ce traité de « une chose parfaite pour notre relation avec l'Iran, non. Mais pour le nucléaire, qu'avez-vous comme une meilleure option ? Je ne le vois pas. Quel est le scénario de simulation, ou votre plan B ? Je n'ai aucun plan B... »

Macron a exprimé des doutes quant à la capacité de la Corée du Nord à négocier avec Washington sur son arsenal nucléaire, et a insisté sur le fait qu'il voulait « travailler avec » le président russe Vladimir Poutine, tout en accusant Moscou de « fausses nouvelles ».

Les remarques de Macron sont un avertissement que le système capitaliste mondial traverse une crise mortelle. Malgré les tensions profondes et croissantes entre l'impérialisme américain et ses homologues européens, tous sont engagés dans une guerre qui s'intensifie. Après un quart de siècle de guerre impérialiste à travers le Moyen-Orient et l'Afrique depuis la première guerre du Golfe contre l'Irak et la dissolution de l'Union soviétique en 1991, Paris comme Washington se préparent à rediviser le monde sur la base de néocolonialisme.

Macron a participé aux frappes de missiles menées par les États-Unis contre la Syrie le 14 avril, risquant de provoquer un affrontement militaire direct avec les forces russes stationnées en Syrie et montrant que le monde est au bord d'un conflit entre les principales puissances nucléaires.

La visite de Macron elle-même indique des conflits croissants entre les puissances de l'OTAN elle-même provoquées par leurs tentatives de rediviser le monde parmi eux. L'invitation de Trump à Macron pour une visite de trois jours, y compris une conférence de presse conjointe aujourd'hui et un discours aux deux chambres du Congrès américain demain, contraste très fortement avec le traitement de la chancelière allemande Angela Merkel. Son invitation pour une visite de travail d'une journée vendredi, après la visite d'État de trois jours accordée à Macron, équivaut à une décision délibérée des États-Unis de snober Berlin.

Peu de temps après que Berlin et Paris aient annoncé leur intention de diriger l'UE dans la formation d'une armée européenne, ce qui a provoqué l'inquiétude des États-Unis et leur exigence pour des assurances que ces plans seraient compatibles avec l'alliance de l'OTAN. En réalité cela représente une tentative des États-Unis de mettre en échec l'axe de Paris-Berlin au même moment où Berlin a manifesté son opposition aux appels de Macron pour une réforme des institutions financières de l'UE. L'enjeu des manœuvres croissantes entre les puissances européennes sur quel puissance de l'UE peut développer les relations les plus étroites avec Washington après le départ du Royaume-Uni de l'UE est la bataille pour prendre l'ascendant au sein de l'UE elle-même.

Malgré leurs différences amères, les élites dirigeantes s'unissent cependant pour insister sur le fait que la classe ouvrière doit payer pour l'édification militaire et les plans de guerre, malgré l'opposition croissante et les luttes de grève dans la classe ouvrière.

Interrogé par Wallace pour savoir s'il pouvait défendre sa politique d'augmentation des impôts sur les retraités afin de financer une réduction d'impôt de plusieurs milliards d'euros pour les riches, Macron la défendit effrontément comme une mesure nécessaire pour empêcher les entreprises de quitter la France. Il a répondu qu'il pensait que la mesure était « juste », ajoutant : « Parce que quand les gens réussissaient avec une entreprise et ainsi de suite, surtout les entrepreneurs, ils devaient quitter le pays s'ils voulaient s'échapper. Donc, nous avons perdu beaucoup d'occasions. »

Interrogé sur les grèves dans l'industrie ferroviaire contre les projets de privatisation des chemins de fer nationaux et de réduction des salaires et des droits sociaux, Macron a déclaré : « Je connais la situation, je sais ce qui est juste et injuste ; et ce qui peut être obtenu et ce qui ne peut pas être obtenu. »

Alex Lantier

Article paru d'abord en anglais, WSWS, le 24 avril 2018

La source originale de cet article est  wsws.org
Copyright ©  Alex Lantier,  wsws.org, 2018

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Paru sur craigmurray.org.uk sous le titre The Noisy Frenchman

A l'été 1975, j'avais seize ans. Je m'asseyais chaque jour au bord de la fontaine du Centre Aviemore, où j'attendais de réparer un kart d'enfant s'il se cassait ou si une pièce se coinçait dans le mécanisme de paiement, et je lisais une bonne édition d'Un Américain bien tranquille, de Graham Greene.